Quand l’Académie militaire de la gendarmerie nationale forme les officiers de pays amis
- Par Antoine Faure
- Publié le 05 octobre 2024
Chaque année, des officiers et sous-officiers de pays amis de la France intègrent l’Académie militaire de la gendarmerie nationale, soit en première, soit en seconde année de la formation initiale. Un dispositif très enrichissant également pour les élèves français. Témoignages.
Ils n’ont pas le même drapeau, pas le même hymne, mais à l’Académie militaire de la gendarmerie nationale (AMGN), ils portent le même uniforme. Les sous-lieutenants Essodong et Lamine et les lieutenantes Emma et Élisa font partie de la 130e promotion, baptisée « Ceux de Stonne », en hommage aux combattants français de la bataille de Stonne, en mai 1940. Essodong vient du Togo, Lamine de Guinée, Emma et Élisa, elles, sont françaises. Tous suivent actuellement leur seconde année de formation au sein du premier groupement d’instruction de l’AMGN.
« Nous avons deux catégories d’élèves étrangers, explique le capitaine Gauthier Roudaut, commandant en second de ce premier groupement. Tout d’abord les sous-officiers de carrière dans les Forces de sécurité intérieure (FSI) à statut militaire de pays amis, au nombre de seize, principalement des pays francophones du continent africain, qui intègrent la promotion comme leurs camarades français, et suivent tout le cursus pendant deux ans, qu’il s’agisse de la formation académique, tactique, linguistique… À leur retour, ils intégreront le corps des officiers de leur pays. La seconde catégorie, ce sont des officiers de carrière dans leur pays, là aussi principalement originaires de pays africains, mais aussi d’autres continents, qui intègrent l’AMGN pour suivre la seconde année de formation initiale, au même titre que les officiers d’autres armes ou issus des grandes écoles militaires. »
La plus grande expérience que je pourrais vivre dans ma carrière
Sous-officier de la gendarmerie nationale guinéenne, Lamine est arrivé à Melun en août 2023. « J’ai eu cette opportunité de venir me former en France grâce à la coopération qui lie nos deux pays, précise-t-il. La gendarmerie française est la mère de toutes les gendarmeries, et c’était donc logique pour moi de venir ici, à la source en quelque sorte. Je savais que ce serait la plus grande expérience que je pourrais vivre dans ma carrière. »
Pour bénéficier d’une des deux places attribuées à la Guinée, Lamine a passé des tests de présélection. Les cinq éléments retenus ont ensuite passé un concours comprenant des épreuves physiques (8 kilomètres de course, 60 pompes, 15 tractions, 70 abdos), puis une évaluation des connaissances militaires, de la culture générale et de la compréhension de la langue française.
Seul Togolais à avoir rejoint la promotion, Essodong ambitionne de « franchir un échelon pour devenir planificateur. C’est une aubaine pour moi de pouvoir me former au commandement en France, le pays qui nous a légué notre organisation et notre manière de fonctionner. » Comme Lamine, Essodong sera affecté en école à son retour dans son pays, pour transmettre à son tour l’enseignement qu’il a reçu. « On m’a aussi envoyé ici pour permettre une mise à jour du système dont nous avons hérité, et être en mesure de restituer ces changements, afin que le maximum de personnes puissent en profiter, poursuit-il. Il n’y aura aucun temps de latence. Pendant que mes camarades français prendront leur premier commandement, je retournerai à l’école ! »
Issue du recrutement universitaire, après cinq ans de droit, Emma voit dans la présence d’élèves étrangers un double intérêt, professionnel et personnel. « Ce sont des sous-officiers, ils ont déjà une bonne connaissance du terrain et beaucoup de choses à nous apporter. Ils peuvent nous expliquer comment les choses fonctionnent dans leur pays, et c’est un vrai plus pour nous. Et puis bien sûr, sur un plan plus personnel, c’est très enrichissant de découvrir d’autres cultures, au contact de personnes pleinement intégrées à la promotion. »
Élisa, également juriste de formation, considère que « cela participe de la nécessaire ouverture d’esprit dont doit savoir faire preuve un officier. C’était vraiment très intéressant, notamment pendant les camps militaires, où nous avons pu profiter de leur expérience. C’était marquant et très enrichissant. Il y a aussi eu des moments plus amusants, quand on a fait notre méthode naturelle à Châteaulin par exemple, on a senti que c’était un milieu auquel ils n’étaient pas forcément habitués ! D’ailleurs, il a aussi fallu qu’ils s’adaptent au climat de Melun ! Et certains n’étaient jamais venus en France, donc pour moi qui suis parisienne, c’était important de leur faire découvrir Paris. »
À plus long terme, ces liens tissés pourraient s’avérer précieux dans la perspective de futurs engagements au titre de la coopération internationale. « Si l’opportunité se présente ! », sourit Emma. « Cela peut effectivement susciter des vocations pour suivre des parcours internationaux, et cela renforce le réseau des anciens élèves de l’AMGN, ce qui peut faciliter des actions de coopération futures », confirme le capitaine Roudaut.
Être à la hauteur de la mission confiée par mon pays
Élèves-officiers en première année de formation, affectés au deuxième groupement d’instruction de l’AMGN, Jean-Baptiste et Fatima viennent de Côte d’Ivoire. « Je suis ici afin d’emmagasiner le maximum de connaissances et d’expérience afin d’en faire profiter mon pays, à la fois pour la sécurité intérieure et la défense nationale, indique Jean-Baptiste. Ma dominante, c’est le maintien de l’ordre, et je serai bientôt appelé à commander des hommes. Je suis impatient de terminer ma formation, afin de pouvoir intégrer un escadron de gendarmerie mobile dans mon pays. Mais bien sûr, si ma hiérarchie décide de m’affecter dans une école pour transmettre à mon tour ce savoir, je le ferai avec une grande fierté. »
Pour Eudoxie, issue du recrutement universitaire et réserviste de la gendarmerie pendant ses études, « les échanges permettent de voir que nous avons un socle technique commun, notamment pour les actes réflexe. » Romain, issu du recrutement semi-direct après cinq années en unité territoriale et une année en Section de recherches, abonde dans le sens de sa camarade. « Je suis dans le même peloton que Jean-Baptiste et, pour avoir déjà combattu en exercice à ses côtés, j’ai pu constater que le socle d’enseignement du combat terrestre est identique et que la rusticité dont font preuve les instructeurs ivoiriens est au moins égale à celle des instructeurs en école de sous-officiers de gendarmerie, témoigne-t-il. C’est très intéressant d’avoir ces échanges. En nous faisant l’honneur de suivre notre formation et de devenir nos camarades, ces militaires étrangers nous enrichissent de leurs connaissances. »
Fatima conclut : « C’est une école très prestigieuse. Tout ce que je vais pouvoir acquérir comme compétences physiques, intellectuelles, opérationnelles, me permettra d’être à la hauteur de la mission confiée par mon pays. »
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