Jeux Olympiques de Paris 2024 : la gendarmerie des transports aériens protège les cieux depuis le sol

  • Par le chef d'escadron Charlotte Desjardins
  • Publié le 26 juillet 2024
© SIRPA-G - BRC F. ARRIGHI

La Gendarmerie des transports aériens (GTA), qui a fêté ses 70 ans l’an dernier, est impliquée dans la sécurisation des Jeux Olympiques au sein des aéroports civils et sur tout ce qui relève de la sécurité dans les airs, en lien avec l’aviation civile. Le général Philippe Mirabaud, à sa tête depuis deux ans, revient sur les enjeux et les missions de cette gendarmerie spécialisée durant les J.O.

Mon général, pouvez-nous rappeler les missions générales de la GTA et les spécificités liées à ces Jeux olympiques ?

La GTA, c’est un peu moins de mille personnels, et nous sommes habituellement implantés sur une quarantaine de sites, aéroports ou sites sensibles de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), avec deux grandes missions : la protection des aéroports, et notamment des zones réservées, et une mission plus générale de police aéronautique sur l’ensemble du territoire. Nous avons aussi des missions de renseignement et de police judiciaire en lien avec le domaine aéronautique civil. Cela va, par exemple, du trafic de stupéfiants qui transite par les aéroports, aux vols et trafics de pièces aéronautiques, en passant par les accidents d’aéronefs. En somme, toutes les infractions commises sur un aéroport ou en lien avec le monde de l’aéronautique civile.


Durant les Jeux, le cœur de la mission est d’assurer un haut niveau de sûreté sur les plateformes aéroportuaires, ainsi que la maîtrise depuis le sol de toute la situation aérienne sur l’Île-de-France ainsi que sur les autres villes accueillant des épreuves. Concrètement, cela implique de réduire tout risque de menace partant d’un aéroport ou aérodrome.
Nous nous appuyons donc sur notre expertise et nos compétences pour décliner un dispositif de sûreté sur les aéroports et le territoire national. Sur les aéroports, il s’agit principalement de renforcer, voire durcir les procédés habituels de protection sur les emprises de Roissy-Charles-De-Gaulle, Le Bourget et Orly, en vue d’une réactivité plus importante.

Un maître de chien gendarmerie en haut noir et bas de treillis montre la roue d'un véhicule grande capacité noir sur un parking
© SIRPA-G - BRC F. ARRIGHI

Y a-t-il des spécificités dans le cadre de vos missions de police aéronautique ?

Dans le cadre des Jeux de Paris, nous contribuons directement au Dispositif particulier de sûreté aérienne (DPSA), demandé par le Premier ministre et confié à l’Armée de l’Air et de l’Espace (AAE).
De son côté, cette dernière assure la surveillance du ciel à l’aide de ses capteurs radar, prête à déclencher l’intervention avec ses avions si nécessaire.
S’agissant du segment sol et de ce qui se passe sur les aérodromes franciliens, c’est la GTA qui est en charge de la mission.
Le tout est piloté par le Centre de coordination civilo-militaire des opérations aériennes (C3MOA), placé sous l’autorité de l’AAE. Celui-ci associe à la fois l’armée de l’Air et de l’Espace, la DGAC et la GTA, afin de traiter le plus efficacement possible l’ensemble de la situation aérienne liée au DPSA.

Le DPSA, qu'est-ce que c'est ?

Un DPSA est destiné à prévenir tout acte malveillant depuis les airs, qu’il soit d’origine terroriste, militaire ou encore contestataire. Déployé en complément du socle de la Posture permanente de sûreté aérienne (PPS-A), il vise à renforcer la protection d’un événement sensible. Ce dispositif forme une bulle de protection comprenant une Zone interdite temporaire (ZIT), dans laquelle aucun aéronef ne peut pénétrer, et une Zone réglementée temporaire (ZRT), dont l’accès est contrôlé et soumis à autorisation. Le DPSA est activé sur ordre du Premier ministre pour sécuriser des événements à caractère sensible. Plusieurs centaines de militaires peuvent ainsi être mobilisés au sol et dans les airs dans le cadre de la mise en œuvre de bulles de protection autour d’événements.

Concrètement, il s’agit de lutter contre une menace qui viendrait du ciel, telle qu’un aéronef qui aurait décollé et voudrait, par exemple, se crasher sur Paris. Une zone d’interdiction temporaire a ainsi été mise en place autour de Paris afin d’interdire, en principe, tout vol, du 22 juillet à la fin des Jeux Paralympiques, avec une trêve entre les deux périodes.
Mais pour permettre à l’aviation, et notamment l’aviation générale [NDLR : c’est-à-dire l’aviation de loisir et l’aviation d’affaire] de fonctionner, nous donnons des dérogations à travers des autorisations de vol.


Le C3MOA reçoit les demandes de dérogation et les instruit. Nous nous chargeons du volet sécurité, c’est-à-dire du contrôle des pilotes et des passagers, en les passant aux fichiers. C’est ce qui nous permet d’établir chaque jour une liste d’autorisations de vol pour le lendemain. Un listing partagé des vols autorisés a été mis en place entre l’armée de l’Air et de l’Espace, la Préfecture de police, la Gendarmerie des transports aériens et la Police aux frontières.


La GTA prend aussi en charge tous les contrôles au sol sur l’ensemble des aérodromes de la région parisienne, soit une quinzaine d’emprises, comme à Toussus-le-Noble, Chavenay-Villepreux, Pontoise, Lognes… Nous y opérons des contrôles très fréquents, afin de vérifier que le pilote qui va décoller et ses passagers sont bien ceux prévus sur le plan de vol.
L’ensemble du monde de l’aviation générale comprend tout à fait ces contrôles et les accepte, jouant pleinement le jeu. À notre demande, ils ont mis en place un réseau de confiance, et sur chaque aéroport, un contact désigné va recueillir les demandes de dérogation et nous les transmettre. Nos militaires travaillent en proximité avec eux pour avoir des informations sur les vols à venir et les vols annulés. Nous en profitons pour redonner ou préciser les règles au besoin, ce qui nous permet, au final, une situation maîtrisée.
Ces missions de police aéronautique sont très marquées autour de Paris, mais se déploient aussi ailleurs, comme à Marseille, où la GTA visite les aérodromes secondaires pour limiter le risque.


Plus ponctuellement, d’autres aéroports sont concernés, comme ceux de Nice, Nantes, Bordeaux ou Lyon, qui accueillent aussi des épreuves des Jeux.

Contrôles des pilotes :

Pendant toute la durée des J.O., la GTA va contrôler de manière aléatoire les pilotes. Les contrôles porteront sur le pilote (licence, visite médicale, alcool-stups), l’aéronef (certificat de navigabilité…) et l’autorisation de vol.
Sur l’un de leurs aérodromes, les militaires auront à effectuer des contrôles un peu particuliers, car y sont basés les avions du diffuseur des Jeux Olympiques. Ces appareils ont vocation à servir d’avion-relais ou d’aéronef de prise d’images au-dessus de Paris. Il y a donc une sensibilité très importante et ils seront donc contrôlés tous les matins.

Comment organisez-vous vos effectifs au sein du dispositif, alors même que la période estivale est toujours chargée dans le secteur de l’aéronautique ?

Tous les jours, pendant les J.O., 500 à 550 militaires, dont 20 à 40 réservistes, seront mobilisés uniquement sur cette mission et les aéroports concernés, soit un peu plus de la moitié de notre effectif global.
Les autres personnels sont placés sur les missions habituelles de la GTA, à une période où, en effet, avec l’été aéronautique, les principaux aéroports connaissent une forte activité.
Par exemple, nous tenons un poste provisoire sur la presqu’île de Saint-Tropez tout l’été pour contrôler le trafic hélicoptère, en raison d’une réglementation qui s’est durcie ces dernières années. Même chose sur l’aéroport de Figari, en Corse, dont l’activité estivale touristique est particulièrement chargée.

Un tireur d'élite gendarmerie en treillis de prolfil, allongé, le bras gauche replié et la main droite sur le fusil, autour,des structures grises bétonnées et métalisées
© SIRPA-G - BRC F. ARRIGHI

La gendarmerie des transports aériens est également engagée sur la Lutte anti-drone (LAD). Comment s’est-elle organisée ?

L’enjeu est clair pour nous : faire en sorte que la protection LAD des aéroports parisiens soit permanente. Cela passe par la détection, la neutralisation et, si possible, l’interpellation.
Le COLAD (Centre Opérationnel de Lutte Anti-Drones) de niveau 1, le plus élevé, est confié à l’Armée de l’Air et l’Espace et celui de niveau 2 à la Préfecture de police de Paris. La GTA s’est quant à elle vu confier le centre opérationnel LAD de 3e niveau, installé à Roissy, et qui coordonne l’action de LAD à la fois sur les aéroports parisiens, sur les sites du Bourget et sur quelques sites olympiques à proximité de cette zone.


Nous coordonnons une grande diversité de capteurs (AAE, GTA, mais aussi ADP – Aéroports de Paris -, qui a récemment déployé ses propres systèmes) pour détecter les drones. La mission de neutralisation et d’interpellation éventuelle des télépilotes relève de la GTA. C’est toujours l’interpellation que l’on privilégie, c’est le meilleur moyen de savoir qui est l’auteur et quelles sont ses intentions.


Depuis deux ans, nous avons construit et mis en œuvre un plan de formation et d’utilisation au quotidien des moyens LAD, afin d’augmenter notre vivier en interne et notre maîtrise de cette mission.
Il y a plus d’un an, nous avons commencé à mener des campagnes de contrôle LAD autour des grands aéroports parisiens, où on détecte régulièrement des drones volant dans la zone interdite. Cela nous a permis à la fois de mieux connaître notre environnement et d’imposer une sorte de pression sur les télépilotes qui sont à proximité, en passant par des interpellations et des procédures judiciaires quand le cadre n’était pas respecté. Et les résultats ont été là. L’objectif : faire connaître cette interdiction de vol et baisser le « bruit ambiant ». Ce qu’il faut avoir en tête, c’est qu’un drone près des pistes, c’est potentiellement un arrêt des atterrissages et des décollages, et donc des retards généralisés.


Nous recevons encore cette semaine de nouveaux fusils brouilleurs, et d’ici la fin de la semaine, nous mettrons en place, sur les secteurs de Roissy-Le Bourget et Orly, deux véhicules équipés de moyens de détection, afin de détecter et d’interpeller plus facilement au cours des patrouilles.
En plus de cette gestion qui nous est propre, quelques-uns de nos opérateurs LAD ont rejoint la task force LAD mise en place par le Commandement des forces de la gendarmerie (COMFORGEND) pour les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024.

La cérémonie d’ouverture

C’est une situation quasi-historique du point de vue de l’aviation civile, puisqu’il a été décidé, à l’occasion de la cérémonie d’ouverture des J.O. de Paris 2024, de fermer l’espace aérien sur un rayon de 80 nautiques c’est-à-dire 150 km autour de Paris ce vendredi 26 juillet. Il n’y aura pas un atterrissage, pas un décollage et pas un avion en transit au-dessus de Paris. Un grand challenge ! Les militaires de la GTA seront donc présents sur les aéroports et les aérodromes pour s’assurer qu’il n’y ait pas d’activité particulière, vérifier que personne ne décolle et garantir une maîtrise complète de la zone.

En résumé, on assiste à une montée en puissance de la GTA, qui a commencé à se concrétiser à dix jours des Jeux de Paris ?

Depuis deux ans, outre la formation LAD pour nos militaires, nous avons renforcé le travail de nos Pelotons de surveillance et d’intervention (PSIGTA) sur leurs missions habituelles, sur tout ce qui pourrait concerner une attaque terroriste ou un risque d’intrusion sur des aéroports par des activistes. Nous avons aussi densifié notre préparation sur le volet NRBC (Nucléaire, Radiologique, Bactériologique, Chimique), et accentué les missions de police aéronautique pour avoir des gendarmes parfaitement à l’aise sur les contrôles.
Depuis ce lundi 22 juillet, le dispositif est en place, après une montée en puissance au cours de la semaine précédente. Nous multiplions les contrôles d’avion et nous avons de nombreux personnels également mobilisés à Roissy dans le cadre des arrivées de délégations sensibles. À ce titre, nous venons en renfort de la Préfecture déléguée aux aéroports parisiens, pour prendre en charge des escortes de bus vers les terminaux. Nous sommes aussi des facilitateurs an cas d’événements non prévus.
Ainsi, sûreté, réactivité et enthousiasme sont les maîtres mots de la GTA, qui est pleinement engagée pour que le volet aérien des J.O. soit une réussite.

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