À quelques jours de l’ouverture des Jeux Olympiques de Paris, les gendarmes inspectent les sites de la compétition

  • Par le capitaine Tristan Maysounave
  • Publié le 24 juillet 2024
Les EOR inspectent le site olympique Champ de Mars.
© GEND/ SIRPAG/ BRC ARRIGHI

À l'approche de l’ouverture des Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris, forces de sécurité intérieure et forces armées françaises et étrangères s’activent à inspecter l’ensemble des sites de compétition. Une opération hors norme à bien des égards.

Les JOP de Paris 2024 s’ouvriront le 26 juillet prochain. En métropole et en outre-mer, 35 sites accueilleront les différentes épreuves. De manière inédite dans l’histoire de la compétition, le comité d’organisation a fait le choix de construire plusieurs installations temporaires. Sept, puis cinq sites sont ainsi installés puis démontés en plein cœur de Paris, respectivement pour les Jeux Olympiques, puis Paralympiques. Près de 800 000 personnes par jour sont attendues. En raison de la dimension internationale de l’évènement et des menaces identifiées (terrorisme, mouvements contestataires, cyberattaques, etc.), près de 30 000 policiers et gendarmes seront mobilisés chaque jour et jusqu’à 45 000 pour la seule cérémonie d’ouverture. Depuis plusieurs semaines déjà, des équipes composées de forces de sécurité intérieure et de forces armées françaises et étrangères inspectent minutieusement les sites de compétition et de la cérémonie d’ouverture, dont l’ensemble des quais de Seine, avant leur ouverture au public.

Une préparation méticuleuse

Du 8 septembre au 28 octobre 2023, la France a accueilli la 10e coupe du Monde de rugby. Cet évènement majeur a permis de préparer les JOP. En effet, les acteurs étatiques ont eu à organiser et sécuriser une compétition se déroulant sur plusieurs sites et accueillant des supporters venus du monde entier. La coopération interservices a joué un rôle primordial, tant pendant la compétition qu’en amont, notamment lors des inspections de sécurité. Les stades ont fait l’objet de visites menées par des Équipes d’intervention technique (EIT), composées de démineurs, d’EOR (Explosive ordnance reconnaissance) et d’équipes cynophiles issus de la gendarmerie et de la police nationales, des armées ou encore de la sécurité civile, afin de vérifier l’absence d’explosifs au sein des enceintes sportives et de lever toute menace Nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC).

La qualification d'EOR

Dispensée par le Pôle interarmées MUNEX (PIAM) d’Angers, la qualification d’Explosive ordnance reconnaissance (EOR) est une formation agréée par l’OTAN. Elle permet notamment de réaliser des inspections visuelles de sites, en complément des opérations menées par les équipes cynophiles, afin de s’assurer qu’ils ne soient pas minés ou qu’il n’y ait pas d’objet suspect pouvant contenir des explosifs. La gendarmerie nationale et les forces armées sont les seules à disposer de cette compétence. La gendarmerie dispose d’un véritable savoir-faire dans ce domaine, avec un vivier de plus de 900 EOR répartis sur tout le territoire national.

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« Lors de la coupe du Monde de rugby, nos équipes cynophiles ont travaillé avec les autres services sur des surfaces très importantes ; le retour d’expérience nous a permis d’anticiper les difficultés », explique le capitaine Guillaume Godineau, référent national cynotechnie de la gendarmerie. Ce que confirme le colonel David Bême, chef du Bureau de la défense et de la sécurité nationale (BDSN) et coordinateur des effectifs gendarmerie pour les inspections de sécurité des sites olympiques : « la manœuvre que nous menons lors des JOP de Paris 2024 a déjà été éprouvée pendant la coupe du Monde de rugby. Nous avons pu tester notre coordination et créer des équipes communes interservices. Nous nous sommes préparés pendant plus d’un an et demi en tirant les enseignements de cet évènement. Mais cette compétition était relativement simple, car nous n’avions à sécuriser que des infrastructures connues et fermées. Or, dans le cadre des Jeux, nous avons aussi à inspecter des sites éphémères construits par des entreprises extérieures. En conséquence, dès le début d’année, nous avons commencé à effectuer des pré-visites avec les responsables de Paris 2024 afin d’identifier les difficultés éventuelles et de déterminer le nombre de personnels nécessaire à l’inspection de chaque site. Pour les sites qui n’étaient pas encore montés, nous avons notamment travaillé sur plan. »

Sécurisation de la petite finale de la Coupe du Monde de rugby

À l’approche des inspections, les responsables de sites préparent les dossiers. « Je suis leader d’inspection des sites Tour Eiffel et Champ de Mars, raconte l’adjudant-chef David, responsable de la cellule EOR au sein de la gendarmerie nationale. La préparation du dossier de site se fait en amont. Elle est longue et fastidieuse. J’ai d’abord pris rendez-vous avec le responsable de la sécurité du site J.O. afin d’effectuer une pré-visite, puis j’ai récupéré un maximum d’informations et de cartographies afin de répartir au mieux les EIT qui procéderont à l’inspection. »

Une manœuvre interservices inédite

« Le dispositif est inédit car nous avons la tâche de sécuriser l’intégralité des sites de la compétition et de la cérémonie d’ouverture, ce qui n’avait jamais été fait, précise le colonel Bême. Habituellement, nous ne  procédons qu’à l’inspection des parties empruntées par les athlètes et les VIP. Le défi majeur consiste donc à vérifier chaque site de fond en comble. Nous inspectons les sous-sols et parkings, les infrastructures permanentes et modulaires ou encore les toits. Les autres enjeux sont de vérifier chaque site en une journée et de parvenir à réaliser l’inspection de plusieurs sites en même temps. Ces contraintes impliquent d’engager des effectifs conséquents, en moyenne 150 personnels par site. La collaboration interservices est déterminante. Nous avons commencé par le village olympique, qui a mobilisé 450 spécialistes par jour pendant cinq jours. »

EOR inspectant le dessous d'un barnum.
© GEND/ SIRPAG/ BRC ARRIGHI

En raison du nombre important de sites, la responsabilité des inspections a été confiée à différentes entités (gendarmerie, déminage, préfecture de police de Paris, ministère des Armées, sécurité civile). La gendarmerie nationale est ainsi leader d’inspection sur 14 sites, à l’image des installations Champ-de-Mars et Invalides. Elle doit alors assurer la coordination d’unités et de spécialistes provenant de différents services français et étrangers (gendarmerie, déminage, douanes, préfecture de police de Paris et police nationale, Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises – DGSCGC, Détachement central interministériel d'intervention technique – DCI-IT).

« L’intérêt de bénéficier du renfort d’unités étrangères est de pouvoir engager suffisamment d’effectifs au regard des contraintes que représentent les nombreux sites à inspecter et les délais restreints dont nous disposons, sans avoir à mobiliser l’ensemble des spécialistes de nos territoires, précise le colonel Bême. C’est finalement du donnant-donnant. Lors de la coupe du Monde de football 2022, organisée au Qatar, la France avait projeté des effectifs afin de renforcer les unités locales. Il en a été de même lors de l’Euro 2024 qui vient de se terminer. Il s’agit d’évènements tellement sensibles et importants qu’il n’est pas possible d’agir seul. L’engagement de forces étrangères permet également de faire de la réassurance. Les délégations étrangères sont rassurées par la présence de leurs forces engagées sur notre territoire, qui constatent la qualité du dispositif mis en place. »

Équipe cynophile norvégienne effectuant des recherches sur un conteneur.
© GEND/ SIRPAG/ BRC ARRIGHI

« C’est la première fois que je suis engagé sur une mission de cette ampleur avec des camarades d’autres pays, explique Martin, maître de chien norvégien. J’avais déjà pu collaborer avec des unités françaises dans le cadre de l’opération Barkhane menée au Mali. J’étais volontaire pour être engagé sur les JOP de Paris 2024. Il s’agit d’une expérience intéressante, qui nous permet de découvrir comment les autres pays travaillent et comment leurs maîtres de chien procèdent aux recherches. Nous échangeons beaucoup, la collaboration est excellente. Je suis arrivé début juillet et je repartirai au début du mois d’août1. »

Les leaders d’inspection coordonnent les équipes depuis des postes de commandement et effectuent des points de situation avec la préfecture de police de Paris toutes les deux heures. Ceux-ci permettent de s’assurer du bon déroulement global des opérations et de pouvoir procéder à des rééquilibrages d’effectifs en temps réel en fonction des difficultés éventuelles rencontrées sur site. Les équipes ont par exemple pu rencontrer cette situation lors de l’inspection réalisée au « Village des Médias ». Même si cette problématique avait été anticipée, les inspections se sont avérées particulièrement fastidieuses en raison des nombreux matériels présents et des valises de transport (flight cases) utilisées par les journalistes et les techniciens. Lorsque des pièces, des zones ou des matériels ne peuvent pas être totalement inspectés, les équipes émettent alors des réserves dans un rapport adressé au comité d’organisation des Jeux.

EOR de face inspectant le site olympique Champ de Mars
© GEND/ SIRPAG/ BRC ARRIGHI

Les inspections de sécurité se termineront le jour de la cérémonie d’ouverture avec la sécurisation des bords de Seine, qui sera effectuée le jour même afin de ne pas générer trop de contraintes pour les riverains. Les équipes devront procéder à l’inspection de 14 kilomètres de berges. À l’instar des opérations menées depuis plusieurs semaines, elles seront appuyées par des opérateurs drone afin de vérifier les parties des ponts difficilement accessibles.

Le drone, nouveau mode opératoire

« La coupe du Monde de rugby nous a montré que les inspections effectuées en hauteur s’avéraient parfois compliquées, explique le colonel Bême. Les toitures pouvaient être difficilement accessibles et nous devions disposer d’habilitations particulières, voire être accompagnés d’un technicien du site. Ces situations généraient une perte de temps. L’un des RETEX (retour d’expérience) de la coupe du Monde de rugby a donc été d’envisager d’utiliser des drones lors des JOP. Ce mode opératoire a d’abord fait l’objet d’une validation en interne puis d’une validation ministérielle. L’emploi de drones nous permet de bénéficier d’un gain de temps. Les télépilotes, ne disposant pas de la qualification d’EOR, sont binômés avec des EOR. Nous parvenons ainsi à effectuer des reconnaissances rapides et efficaces. »

Opérateur drone et EOR effectuant une vérification.
© GEND/ SIRPAG/ BRC ARRIGHI

La Gendarmerie des transports aériens (GTA) fournit 25 opérateurs pour les sites d’Île-de-France. Compact et déployable rapidement, le drone est complémentaire de l’action des unités au sol, comme le relate l’adjudant Jimmy, affecté au Peloton spécialisé de protection de la gendarmerie (PSPG) de Valduc et engagé dans le cadre des inspections de sécurité en raison de sa qualification d’EOR. « Le drone nous permet de couvrir une grande surface de terrain. J’analyse les images qu’il fournit et je détermine si des vérifications supplémentaires sont nécessaires. Celles-ci sont alors faites de manière physique. »

À l’issue des inspections, les sites font l’objet d’un transfert de responsabilité au profit du comité d’organisation, Paris 2024.

Un transfert de responsabilité

Les inspections permettent de transférer la responsabilité de la sécurité des sites au comité d’organisation.

« On procède alors au lock down, précise Richard Landry, responsable sécurité du site des Invalides pour les JOP. Les sites sont surveillés en permanence et seule une accréditation permet d’y pénétrer. »

« Nous conservons une réserve d’intervention pendant le games time, complète le colonel Bême. Le temps de la compétition, nous prépositionnons des équipes à Paris et en province, activables 24h/24 en cas de levée de doute demandée par Paris 2024. »

Les EIT reviendront ensuite à l’issue des Jeux Olympiques afin d’inspecter les sites dédiés aux Jeux Paralympiques. « Le nombre de sites à inspecter sera moins conséquent, conclut le colonel Bême. Il n’y aura qu’un site en province, à Châteauroux, et moins de sites sur Paris. Les inspections seront réalisées en 10 jours, mais pleinement nécessaires, en raison des modifications dont certains sites feront l’objet. »

 

1Propos recueillis et traduits par le capitaine Tristan Maysounave.

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