80e Anniversaire du Débarquement en Normandie : contrôle de zone, sécurisation de sites et gestion des mouvements au cœur de la manœuvre
- Par le commandant Céline Morin
- Publié le 06 juin 2024
Contrôle de zone et des itinéraires, gestion des flux et sécurisation des escortes, sécurisation des lieux de cérémonie, police judiciaire, intervention spécialisée, renseignement, moyens de communication, soutien opérationnel… Le volet terrestre de la manœuvre de sécurisation mobilise 6 050 gendarmes d’active et de réserve, dont 40 escadrons de gendarmerie mobile, appuyés notamment par des moyens centraux de la gendarmerie, à l’instar du GIGN, de la garde républicaine ou encore l’IRCGN.
Le dispositif de sécurité terrestre, maritime et aérienne mis en place du 27 mai au 9 juin 2024, à l’occasion des cérémonies du 80e anniversaire du Débarquement en Normandie, mobilise, au plus fort des événements, le 6 juin, 6 050 gendarmes d’active et de réserve, auxquels s’ajoutent policiers, sapeurs-pompiers et militaires, soit 43 000 personnels.
Déployant l'ensemble des savoir-faire de l'Institution, du soutien opérationnel à l'intervention spécialisée, la manœuvre gendarmerie, placée sous les ordres du général de corps d'armée Hubert Bonneau, commandant la Région de gendarmerie de Bretagne et la gendarmerie pour la zone de défense Ouest, couvre toutes les dimensions du terrain (terre, air, mer, cyber) et de la menace potentielle.
Un terrain complexe
Si la gendarmerie est rodée à la sécurisation de grands événements de ce type, qui plus est ces commémorations annuelles, la manœuvre n’en reste pas moins complexe, qui plus est à l’approche des J.O., nécessitant un long travail d’anticipation et de planification interservices et interarmées.
Ce 80e anniversaire, auquel doivent assister pas moins d’une trentaine de chefs d’État et de Gouvernement et près de 800 000 spectateurs, a en effet la particularité de se dérouler sur un vaste périmètre de près de 1 750 km² (une bande de territoire de 80 km entre Ouistreham et Isigny, pour le Calvados, et d’une vingtaine de kilomètres entre Les Veyx et Sainte-Mère-l’Église, pour la Manche, sur 10 à 20 km dans la profondeur des terres, NDLR), pourvu d’un maillage routier peu propice à l’écoulement d’un flux important de véhicules. À cette première complexité liée au territoire, s’ajoute la densité des événements, avec une trentaine de cérémonies nationales, binationales, voire internationales, organisées entre le 5 et le 7 juin, et ce simultanément ou s’enchaînant parfois très rapidement.
Un calendrier, stabilisé parfois tardivement, impliquant une manœuvre agile s’agissant du pilotage des autorités devant y assister ainsi que des bascules de forces dans des délais contraints aux fins d’assurer la sécurisation des différents sites. À cela s’ajoute la nécessaire coordination avec les services de sécurité et du protocole des délégations étrangères, sans oublier cette année la sécurisation en parallèle du Relais de la Flamme et la survenue d’autres événements d’ampleur sur le territoire, à l’instar des émeutes en Nouvelle-Calédonie, venant impacter la génération de forces.
Mobilisation au sol, en mer et en 3D
Sur le volet terrestre, ce sont plus de 2 000 militaires issus de la gendarmerie départementale, dont 450 motocyclistes, 517 élèves gendarmes et 40 Escadrons de gendarmerie mobile (EGM), qui sont mobilisés, auxquels s'ajoutent notamment les unités et moyens spéciaux du Groupement blindé de gendarmerie mobile (C2NRBC, CNAMO, CNOEIL, CBH, EGAME, DRAP), le GIGN et les unités de la garde républicaine (missions protocolaires, détachement de sécurité publique générale à cheval, tireurs d’élite, recherche d’explosifs). Une base logistique avancée gendarmerie est également mise en place, assurant le soutien de l'ensemble de la manœuvre.
La gendarmerie est également engagée dans le Dispositif particulier de sûreté aérienne (DPSA), à travers la mobilisation de cinq hélicoptères, d’équipes de lutte anti-drone (Section de protection et d’appui drone de la garde républicaine, Gendarmerie des transports aériens) et de dronistes, ainsi que dans le Dispositif particulier de sûreté maritime, à travers les unités de la gendarmerie maritime et des brigades nautiques.
Contrôle de zone et surveillance du territoire, gestion des flux et sécurisation des escortes, sécurisation des lieux de cérémonie, police judiciaire, intervention spécialisée, renseignement, manœuvre des systèmes d'information et de communication, soutien opérationnel… À chacun sa mission pour assurer le bon déroulement des cérémonies.
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Contrôler les zones et garantir la fluidité des axes
Un Groupement opérationnel (G.O.) dédié au contrôle de zone et des itinéraires a été placé sous l'autorité du colonel Christophe Rayneau, chargé de projet à la région de gendarmerie de Normandie. Objectif : tenir et renseigner sur de potentiels mouvements hostiles au président de la République ou autre autorité, ou contraire au bon déroulement des cérémonies.
Engagée dès le 19 mai 2024, avec les moyens des Groupements de gendarmerie départementale (GGD) du Calvados et de la Manche, cette manœuvre de contrôle de zone est montée en puissance à compter du 27 mai, avec l’engagement d’un EGM à trois pelotons au profit de la Manche et d’un EGM à cinq pelotons au profit du Calvados, répartis sur la compagnie de Bayeux et celle de Caen. Leur mission : assurer la surveillance des sites au plus près de l’événement et resserrer le contrôle de zone à compter du 4 juin, à l’approche des cérémonies nationales, binationales et internationales majeures.
« Dans notre zone d’action, qui s’étend du Calvados au Morbihan, nous avons des points d’intérêt et des sites de cérémonies principales et secondaires sur lesquels nous assurons une surveillance accrue, explique le colonel Rayneau. Notre G.O. est donc divisé en plusieurs sous-groupements opérationnels (SGO), chacun dédié à une zone (Bayeux, Caen et GGD 50) ou une mission spécifique (SGO Zone de circulation régulée/ZCR et SGO jalonnement, interdiction, tubage). »
Une ZCR est en effet mise en œuvre le 6 juin, dès 6 heures du matin, afin de limiter les flux entrants dans la zone et ainsi garantir la fluidité des axes sur l’ensemble des sites de cérémonie. Quelque 268 militaires sont ainsi chargés de veiller à ce que seuls les véhicules accrédités circulent dans cette zone. Celle-ci est par ailleurs bordée au sud par un axe rouge (N13), interdit à la circulation. Pour ce faire, celui-ci est jalonné par 316 militaires, à compter de 3 heures du matin jusqu’à 22 heures, au niveau des ponts surplombant l’axe, des sorties et des entrées. La mission est assurée, par relèves successives, par 517 élèves-gendarmes arrivés de Châteaulin la veille.
Parallèlement, les axes en provenance des hub (points de regroupement où les spectateurs sont contrôlés avant d’être transportés vers les sites de cérémonie à bord de véhicules préalablement décontaminés) ainsi que ceux conduisant aux sites de cérémonies dites secondaires, à l’instar d’Hermanville, Courseulles, Arromanches…, sont jalonnés par 234 militaires (l’axe reste ouvert à la circulation. L’objectif est de faciliter le passage des cortèges et de garantir la fluidité des axes, NDLR). Enfin, les routes conduisant aux cérémonies prioritaires (Colleville, Omaha…) ou de moindre importance, mais accueillant le président de la République française, sont quant à elles interdites à la circulation et au stationnement. Cette mission de tubage engage 295 militaires de 6 heures à 22 heures.
Ce sont ainsi près de 1 300 militaires qui sont mobilisés sur l’ensemble de ces missions, dont cinq EGM pour le tubage et le jalonnement des axes prioritaires ; celui des routes conduisant aux cérémonies secondaires étant confié à des compagnies de circonstance, composées de militaires d’active et de réserve issus de plusieurs régions de la zone.
Des bulles étanches autour des sites de cérémonie
À la tête du G.O. sécurisation, le colonel Christophe Beyl, commandant le Groupement de gendarmerie mobile I/9 d'Arras, a quant à lui pour mission d’assurer la sécurité de l’ensemble des cérémonies, quels qu’en soient l’importance et le lieu, durant la période du 2 au 9 juin, mais aussi de tenir un certain nombre de points sensibles, comme les aéroports ou les lieux de regroupement de population.
Pour ce faire, le G.O. dispose d’un volume de gendarmes mobiles variable en fonction des cérémonies. Le 6 juin, au plus fort des événements, ce sont ainsi 29 escadrons qui sont affectés à ces missions, les premiers ayant pris leurs quartiers en Normandie à compter du 2 juin. « Les missions sont réparties entre trois Groupements tactiques de gendarmerie (GTG), chacun sous le commandement d’un colonel, en veillant à ce que les cérémonies les plus importantes ne soient pas confiées au même GTG en même temps, précise le colonel Beyl. Nous avons effectué au préalable des reconnaissances précises afin d’évaluer au plus proche le besoin en unités de forces mobiles Nous avons ainsi optimisé l’emploi de nos ressources. Pour pallier l’effet d’une attrition potentielle des forces au regard de la survenue d’événements en d’autres points du territoire, nous avons préparé en amont une bascule de forces et la révision de nos choix tactiques pour nous concentrer sur les points et les cérémonies les plus sensibles. C’est cette sensibilité de l’événement qui justifie le volume de forces mobilisées. Ma maquette est donc évolutive, notamment en fonction des autorités présentes. Certains sites nécessiteront par exemple la mise en place d’un dispositif dès la veille, avec une montée en puissance le jour J, et ce afin d’assurer une parfaite étanchéité du lieu. Toutefois, nous assurons la sécurité de toutes les cérémonies. »
En amont, chaque commandant de GTG a donc effectué une reconnaissance des sites qui lui avaient été assignés, afin de concevoir pour chacun un dispositif de sécurisation cohérent, à même d’assurer le bon déroulement des cérémonies. Un travail conduit en relation étroite avec les autres G.O., particulièrement ceux dédiés au contrôle de zone et au mouvement, mais également avec le G.O. Réserve d’intervention, à la tête des moyens spéciaux (chiens Rexpemo / Recherche d’explosif sur personne en mouvement, cavaliers de la garde, moyens de lutte anti-drone, GIGN, CNAMO, ou encore camion de dépannage), dont le besoin a pu être identifié lors de ces missions de reconnaissance.
Gérer les mouvements
Un G.O. mouvement, placé sous le commandement du lieutenant-colonel Aurélie Durand, commandant en second le GGD du Calvados, a été mis en place pour gérer le convoyage d’environ 25 000 personnes et 40 délégations officielles sur l’ensemble des sites des cérémonies.
Chacun des quatre sous-groupements qui le composent poursuit une mission spécifique : escorte des chefs d’États, de gouvernements et des délégations officielles ; convoyage des invités (presse, vétérans, etc.) ; fluidification et régulation de la circulation routière ainsi que stationnement des convois ; et, enfin, une réserve d’intervention pour les missions supplémentaires. Pour ce faire, le G.O. MOUV peut notamment s’appuyer sur quelque 450 motocyclistes de la gendarmerie, venus de toute la France, tandis que 170 policiers sont en charge des escortes police.
Un « pool » police judiciaire
Un G.O. Police judiciaire (P.J.) a également été mis en place, sous le commandement du colonel Bruno Langlois, commandant la Section de recherches de Caen, afin de prendre en compte tout type de contentieux liés au 80e Anniversaire du Débarquement en Normandie, permettant ainsi aux GGD de se consacrer au reste de l’activité judiciaire.
Au plus fort des événements, le 6 juin, 147 personnels de la gendarmerie sont ainsi mobilisés pour armer ce pool P.J., sur la base des effectifs de la S.R. de Caen, renforcée par le Groupe interministériel de recherches de Caen, les unités de recherches de la région Normandie (50 enquêteurs) et dix gendarmes issus des unités territoriales de la région.
Pour être en mesure de faire face à des faits ou des constatations spécifiques ou particulièrement importantes, des technicités et unités spécialisées sont également mobilisées : Techniciens en identification criminelle (TIC) du Calvados et de la Manche, personnels de GOS (Groupes d’Observation Surveillance) de la région zonale, quatre militaires du Plateau d’investigation explosifs et armes à feu (PIXAF) du pôle judiciaire de la gendarmerie nationale, trois de l’IRCGN (Institut de Recherche Criminelle de la Gendarmerie Nationale), en mesure de monter en puissance à hauteur de 100, quatre militaires de la S.R. de la gendarmerie de l’Air, deux de la S.R. de la gendarmerie des transports aériens, trois de la S.R. de la gendarmerie maritime, des personnels du CESAN (Commandement pour l’Environnement et la Santé), trois techniciens d’investigation subaquatique (TIS) et, enfin, des militaires de la Cellule de lutte contre les criminalités numériques de Caen, renforcés par ceux de l’unité de Rennes.
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Un travail d’anticipation sur le volet cyber
Le G.O. P.J. s’est par ailleurs mis en ordre de bataille sur le volet cyber dès la fin du quatrième trimestre 2023, en créant deux task forces dédiées, l’une dans le Calvados et l’autre dans la Manche, composées de référents cyber de chaque département et travaillant en lien avec l’ANSSI. L’objectif ? Identifier les entités partie prenante de près ou de loin avec les cérémonies, pour lesquelles une attaque cyber serait incapacitante : mairies et communautés de communes de la zone d’intérêt, préfectures et sous-préfectures, musées, hôtels de luxe, distributeurs d’énergie et d’eau, hôpitaux.
« Après avoir identifié ces acteurs sensibles, nous les avons contactés et leur avons proposé un prédiagnostic cyber, c’est-à-dire un état des lieux de leur parc informatique, nous permettant d’identifier les personnels en charge de leurs réseaux, de déterminer l’existence de failles et de les conseiller pour y remédier. L’ANSSI (Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d’Information), le Secrétariat général pour l’administration du ministère de l’Intérieur (DZNUM) et France Relance ont également réalisé une partie de ces audits. L’idée était d’être le plus vertueux possible, en attirant l’attention de ces acteurs sur la problématique informatique qu’ils pourraient rencontrer et sur le nombre de cyberattaques perpétrées », explique le commandant du G.O. P.J.
Outre cette partie prévention, une recherche active de renseignement a été menée depuis fin 2023 par le COMCYBER-MI s’agissant des menaces cyber visant le 80e Anniversaire du Débarquement en Normandie. « J’ai donc particulièrement attiré l’attention des antennes C3N de Caen et de Rennes pour qu’elles soient en mesure de prendre en compte toute éventuelle infraction identifiée par le COMCYBER-MI », note le colonel.
Trois escadrons et des unités spéciales en réserve d’intervention
À la tête du G.O. Réserve d’intervention (R.I.), le lieutenant-colonel Fabien Jaffard, commandant en second le Groupement de gendarmerie mobile IV/7 de Dijon, dispose de trois EGM, en mesure d’intervenir dans le cadre de troubles à l’ordre public qui pourraient survenir pendant les cérémonies. En cas d’engagement, le colonel quitterait alors son poste au PCO pour prendre le commandement de l’opération sur le terrain.
Le deuxième volet de sa mission concerne la gestion de tous les moyens spéciaux : CNOEIL, CNAMO, peloton Centaure (2 véhicules), F2NRBC, etc. Le GIGN et la manœuvre 3D (hélicoptères, lutte anti-drone, drones) ayant une gestion autonome. Ces moyens spéciaux sont regroupés en réserve d’intervention sur la base logistique avancée de Caen, avec un second plot R.I. à Bayeux, afin de réduire les délais d’intervention sur les sites de cérémonie à l’ouest de la côte normande. « Je suis un fournisseur de moyens, résume-t-il, avant de préciser : il y a eu une reconnaissance des différents sites afin de repérer le meilleur positionnement des R.I., au plus proche des cérémonies. Nous sommes ainsi en mesure de renforcer la réserve d’intervention du G.O. Sécurisation avec moyens spécifiques en cas de besoin, selon l’événement. »
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