Gaëlle Edon : presser la détente, viser la victoire !

  • Par la lieutenante Floriane Hours
  • Publié le 21 août 2024
Photo de Gaëlle Edon. On voit son visage, sur ses oreilles se trouve un casque et sur ces yeux, un cache pour obscurcir un de ses yeux. En amorce de l'image, en flou, on voit sa main et son arme qu'elle pointe devant elle, déterminée.
© Sirpa-G . BRC E.Taupin

Membre de l’équipe des Sportifs de haut niveau de la Défense - Gendarmerie (SHND-G) depuis mai 2023, Gaëlle Edon, vice-championne du Monde de para-tir, se prépare pour les Jeux Paralympiques qui se dérouleront en France du 28 août au 8 septembre 2024. À cette occasion, nous vous proposons de partir à la rencontre de cette athlète hors du commun.

Sacrée vice-championne du Monde en 2024, au Pérou, championne de France depuis huit années consécutives, championne nationale militaire de tir au pistolet en 2019, médaillée de bronze aux championnats d’Europe en 2022 et 2024, et membre de la Fédération française de tir, Gaëlle Edon affiche un palmarès éloquent et un talent dans la pratique du tir qui n’est plus à démontrer. Sportive de haut niveau de la Défense - Gendarmerie (SHNDG) depuis 2023, et marraine du groupement de gendarmerie départementale de Haute-Savoie, la jeune femme de 35 ans se prépare aujourd’hui à affronter les meilleures tireuses du monde à l’occasion des Jeux Paralympiques de Paris, qui se dérouleront du 28 août au 8 septembre 2024. Un nouveau défi bien loin de ce qu’elle aurait pu imaginer il y a encore quelques années.

Au milieu d'autres gendarmes dont un colonel, Gaëlle Edon signe sur une table gendarmerie, le papier qui acte son lien avec le groupement de gendarmerie de la Haute-Savoie.
© Sirpa-G . BRC E.Taupin

Se relever

Il est des personnes dont la capacité de résilience et le caractère forcent l’admiration. Gaëlle Edon est sans nul doute l’une d’elles. En décembre 2012, alors qu’elle se prépare à passer le concours d’entrée en gendarmerie, au sein de laquelle elle est déjà réserviste depuis 2008, la jeune femme, alors âgée de 24 ans, est victime d’un très grave accident du travail survenu en montagne. Souffrant d’une hémorragie cérébrale entraînant des complications, elle subit une trentaine d’opérations et devient hémiplégique, paralysée du côté gauche.

S'ensuivent cinq années de lutte, marquées par une première phase de déni, durant lesquelles cette passionnée de haute montagne va tenter de se reconstruire : « Pour moi, j’allais reprendre ma vie d’avant. Et avant, j’étais très sportive, je faisais plein de haute montagne, comme le camp de base de l’Everest, le mont-Blanc, etc. Donc malgré le handicap, je me suis dit que j’allais faire exactement pareil et que ça allait revenir. J’ai donc refait le mont-Blanc, le Mont Kazbeck, le mont Kenya, j’ai également refait du parapente, et j’ai adapté tout mon matériel pour pouvoir retourner sur les glaciers en haute altitude. Et puis en centre de rééducation, on m’a mise à l’athlétisme et à l’aviron, sauf que faire de l’aviron d’un seul bras, avec deux rames, en autonomie complète, ce n'est pas possible, et à cette période, je ne voulais personne avec moi, je voulais être seule. J’ai donc créé un système pour faire de l’aviron d’un bras en autonomie complète et j’ai déposé le brevet, ce qui m’a valu le premier prix de l’innovation en 2016. »

Un prix qui va attiser l’intérêt des journalistes régionaux, dont certains vont réaliser des articles sur son parcours. C’est en lisant l’un d’eux que le directeur du club de tir de Rumilly, une ville située à l’ouest d'Annecy, va la repérer. Après un échange, il lui propose un essai. Le tir, Gaëlle Edon n’y connaît pas grand-chose, à part ceux effectués dans le cadre de la réserve, mais elle accepte. En janvier 2017, elle se lance. Un mois plus tard, elle remporte les championnats de France et se fait immédiatement repérer par la Fédération française de tir, qui lui propose, deux mois après, un premier stage en équipe de France, « pour voir si c’était un coup de bol ou non », s’amuse la sportive. Trois mois plus tard, elle dispute sa première coupe du Monde et se qualifie pour la finale. La machine « Edon » est lancée.

En six ans, la sportive, pourtant plus habituée aux sommets des montagnes qu’à l’austérité d’une salle de tir, s’impose dans la discipline comme une adversaire redoutable, décrochant, en cinq ans, pas moins de dix-huit titres dans des championnats nationaux, européens, mondiaux et militaires. Un palmarès impressionnant, qui propulse la Française au plus haut niveau, lui permettant de prétendre aujourd’hui à une sélection pour les épreuves de para-tir lors des Jeux Paralympiques qui se dérouleront fin août à Châteauroux.

Dans un centre de tir en intérieur, Gaëlle Edon, sportive de la gendarmerie en para-tir, s'entraine. Elle est assise sur une sorte de chaise haute et tient son arme d'une seule main. Sur sa tenue sombre, on peut lire "sportive de haut niveau de la gendarmerie".
© Sirpa-G . BRC E.Taupin

Un entraînement et une préparation intenses

Mais un tel niveau ne s'acquiert pas par hasard. Et si Gaëlle Edon montre des prédispositions pour ce sport, ses médailles sont avant tout le fruit d’un entraînement extrêmement rigoureux et soutenu. « Je m’entraîne six jours par semaine, avec quatre jours de tir minimum. Le reste, c’est de la préparation physique et de la préparation mentale. Je fais par exemple de l’ORFA (Optimisation des Ressources des Forces Armées) avec la colonelle de gendarmerie à Annecy, deux fois par semaine, quand je ne suis pas en déplacement. Je fais aussi deux entraînements de préparation physique par semaine avec un major du 27e BCA (Bataillon des Chasseurs Alpins) à Annecy. Le reste du temps, pour la préparation physique, je fais chez moi des exercices donnés en amont par le major. Pour les entraînements de tir, c’est quatre fois par semaine, avec, à chaque fois, au minimum 5 à 6 heures, voire 8 heures de tir par jour. »

Lors de chaque entraînement, Gaëlle Edon tire environ 500 balles de 22 long rifle et 200 plombs. « Ça fait pas mal de tirs en effet. D’où l’importance d’une bonne préparation physique, puisque comme je n’ai qu’un bras, je fais tout avec et donc il faut tenir. Et puis je n'ai pas le droit à la blessure. »

Des entraînements que Gaëlle Edon réalise au sein de son club de Rumilly, où son entraîneur vient régulièrement la voir, mais aussi à la Fédération française de tir et, enfin, chez elle, où un centre de tir au pistolet a été installé pour un entraînement au tir à 10 m. Lors des tirs effectués à cette occasion, elle installe sur son arme un petit outil, un Scatt, qui lui permet d’enregistrer toutes ses performances afin de les transmettre à son entraîneur. « Ça permet de savoir si j’appuie bien sur la détente, si mes descentes en cible sont bien nettes, bien alignées. Ni trop rapides, ni trop lentes. Je lui envoie les données enregistrées et il analyse le tout à distance. »

L'arme de Gaëlle Edon qu'elle a, elle même pensé pour que cela soit le plus ergonomique possible. La cross et le support sont en bois.
© Sirpa-G . BRC E.Taupin

Pour la préparation des Jeux, l’athlète ne compte pas changer ses habitudes et va s’en tenir à ses entraînements. Un point important selon elle pour mettre toutes les chances de son côté. « Le tir, c’est vraiment un sport pas comme les autres, c’est très mental. Si vous vous mettez dans une configuration différente de celle dont vous avez l’habitude, vous allez complètement vous planter. Par conséquent, je me mets en tête que c’est une coupe du Monde ou un championnat du Monde. Parce que si je me dis que ce sont les J.O., ça va me faire monter la pression et je ne vais pas être performante. »

Le juste équilibre

Autrefois bien loin de son quotidien et de ses intérêts, le tir a pris aujourd’hui une place centrale dans la vie de Gaëlle Edon, qui a découvert dans ce sport sérénité et apaisement. « Avec le tir, j’ai un peu retrouvé un moyen d’échapper au handicap et au procès qui s’est déroulé après mon accident du travail. Ça m’a permis de trouver un moment à moi, de me créer une bulle de concentration dans laquelle j’oublie tout le reste. Ça m’a permis d’oublier mon handicap et d’accepter ma nouvelle vie. »

En parallèle, Gaëlle, titulaire à l’époque d’un baccalauréat agricole et de deux années d’études supérieures, décide, en 2017, de reprendre ses études. Elle débute avec une capacité en droit, qui la mènera à une licence, puis quelques années plus tard, à un master en droit pénal et sciences criminelles, qu’elle complète actuellement avec un D.U. (Diplôme Universitaire) en criminalistique et sciences forensiques. Une compétence qu’elle a souhaité développer après un stage au sein de la CIC (Cellule d’Identification Criminelle) du groupement de gendarmerie départementale de Haute-Savoie.

Le visage de Gaëlle Edon, sourriante.
© Sirpa-G . BRC E.Taupin

Une vie à 100 à l’heure !

Pour ralentir les choses et se recentrer, en dehors du tir et des études, Gaëlle a aussi besoin de se reconnecter avec sa passion première : la montagne. À chaque retour de compétition, à chaque coup dur, c’est au cœur de ses Alpes, dans son petit village perché en altitude entre Annecy et Genève, qu’elle retrouve des forces. Un équilibre de vie qui lui est particulièrement cher et qui fait aujourd’hui sa force. « Quand vous faites du sport comme ça, ce n’est pas bon de s’y consacrer à 300 %, de ne vivre que pour lui et de consentir pour ça à tous les sacrifices. Il y a beaucoup d’athlètes, valides ou non, qui ne vivent que pour leur sport, qui ne font que ça. Et lorsqu’on est en compétition, ça se ressent dans le stress, dans leur façon d’appréhender le tir, de regarder leur entraîneur, etc. Pour moi, tout ça n’a pas été un objectif au début, et c’est finalement peut-être pour ça que j’y arrive. J’ai juste comme objectif de tirer au milieu d'un carton, je ne joue pas ma vie. »

Aujourd’hui sereine et apaisée, Gaëlle Edon se sent de nouveau prête à conquérir le monde. Une résilience et une force hors du commun dont elle aura besoin pour vaincre ses adversaires, et notamment sa grande concurrente, l’Iranienne Sareh Javanmardi, championne du Monde de para-tir.

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