JOP 2024 : entretien avec le général Lionel Rollin, commandant du Groupement de gendarmerie départementale du Nord

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 05 août 2024
A gauche, debout, le général Lionel Rollin, commandant du Groupement de gendarmerie départementale du Nord. A droite, assis devant un ordinaleur, le lieutenant-colonel Didier Michaud, chef du Poste de commandement opérationnel.
Le général Lionel Rollin, commandant du Groupement de gendarmerie départementale du Nord, échange avec le lieutenant-colonel Didier Michaud, chef du Poste de commandement opérationnel.
© GEND/SIRPA/J. PERRIER

Les militaires du Groupement de gendarmerie départementale (GGD) du Nord sont fortement engagés dans la manœuvre de sécurisation des épreuves des Jeux olympiques de Paris se déroulant… à Lille. Présentation de la manœuvre par le commandant du groupement, le général Lionel Rollin.

Mon général, quand on parle des Jeux Olympiques de Paris, il s’agit presque d’un abus de langage, car ceux-ci ne se déroulent pas uniquement en Île-de-France, mais aussi en province, et notamment dans l’agglomération lilloise. Quel est le rôle de la gendarmerie du Nord dans la manœuvre de sécurisation, et comment celle-ci a-t-elle été anticipée ?

Il est vrai que si Paris est le centre de gravité de ces Jeux Olympiques, on oublie un peu que la province contribue, et en particulier Lille qui, avec 52 matches, de basket-ball, puis de handball, et plus de 500 athlètes, est le deuxième pôle des J.O. après l’Île-de-France.

Cela représente de longs mois de planification, de calage avec l’organisateur. Les premières réunions ont commencé dès la fin de l’année 2022 et au printemps 2023, à la fin des travaux du Village olympique. Nous avons ensuite eu un effet d’aubaine avec la coupe du Monde de rugby, à l’automne 2023, qui a constitué un vrai laboratoire, car la figuration était similaire, à la différence que nous n’avions qu’un match par jour, contre quatre pendant ces J.O.

Mais en termes d’articulation, c’est le même modèle, avec un décloisonnement de la zone police, qui devient une zone mixte, et une répartition des blocs missionnels entre la police et la gendarmerie : la police prenant en compte la sécurisation du lieu de compétition, le stade Pierre Mauroy, ainsi que du centre-ville et des transports ; la gendarmerie sécurisant les sites d’hébergement et d’entraînement, ainsi que toutes les escortes entre ces sites et vers le stade, mais aussi, dans le cas de l’équipe masculine de basket des États-Unis, les transferts vers et depuis Paris, en coordination avec la Préfecture de police (P.P.).

Une fois ces blocs missionnels répartis, comment avez-vous conçu la manœuvre ?

Il fallait d’abord bien définir le cadre avec l’organisateur, répertorier les différents sites et évaluer la menace. Pour chacun des sites, j’ai ensuite fixé une articulation des forces employées, avec des contrôles de tous les accès, des patrouilles mobiles autour du site et des réserves d’intervention en mesure de se projeter en cas d’intrusion. Certains sites étant armés 24 heures sur 24, d’autres uniquement sur les créneaux d’entraînement, même si c’est compliqué avec certaines équipes de disposer d’un planning à l’avance. Nous avons parfois les créneaux la veille pour le lendemain. Il faut donc être très réactif.

Ces éléments m’ont donné une idée du volume de militaires dont j’avais besoin chaque jour, sur l’ensemble de la période, soit entre 250 et 260. À partir de ce besoin, il a fallu aller chercher la ressource. Comme je ne voulais pas faire reposer la manœuvre sur des forces mobiles, dont je savais qu’elles seraient fortement sollicitées et sur lesquelles je n’étais donc pas sûr de pouvoir compter, je me suis appuyé sur ma propre ressource : les gendarmes d’active et les réservistes du groupement. Sur l’ensemble du GGD, je dispose de 1 350 gendarmes d’active et d’une grosse force de frappe de 900 réservistes. Concernant les premiers, j’ai constitué des sections de marche au sein des quatre compagnies situées autour de Lille (Lille, Douai, Hazebrouck et Valenciennes), en préservant celle de Dunkerque-Hoymille, plus au nord, de toute façon concernée par la mission de Lutte contre l’immigration clandestine (LIC), assez dense pendant l’été, et les deux compagnies d'Avesnes-sur-Helpe et de Cambrai, trop éloignées.

Cela m’a permis de constituer une ressource de 380 à 400 gendarmes, sur laquelle je peux m’appuyer pour sécuriser les 10 sites et assurer jusqu’à 90 escortes par jour, sachant que j’ai pu compter pour cette mission sur un renfort de 20 motocyclistes de la Région de gendarmerie des Hauts-de-France, qui sont venus s’ajouter aux 60 de l’Escadron départemental de sécurité routière (EDSR).

Cette force est appuyée par une unité Police judiciaire, armée par huit Officiers de police judiciaire (OPJ), qui prennent en compte les auteurs d’infraction, afin que les gendarmes en mission de sécurisation ne soient pas fixés lors des interpellations, par des télé-pilotes de drones de la Section opérationnelle de lutte contre les cybermenaces (SOLC) et des compagnies du GGD, et enfin par deux équipes de Lutte anti-drone (LAD) de la SOLC, projetables très rapidement pour neutraliser un appareil non-autorisé.

 

Vous avez aussi décidé d’installer un Poste de commandement opérationnel (PCO) au sein du GGD. Pour quelle raison et comment est-il organisé ?

J’ai eu l’occasion de commander des Groupements tactiques de gendarmerie (GTG) sur des opérations de maintien de l’ordre complexes, notamment à Notre-Dame-des-Landes, je sais à quel point c’est fondamental. Il y a une cinétique calée d’avance mais aussi, chaque jour, un lot de surprises et d’imprévus. C’est tout l’intérêt de ce Poste de commandement opérationnel (PCO), et de la ressource dédiée aux missions, afin de pouvoir faire face à ces aléas et monter en puissance. Cela a été le cas, par exemple, lors de l’attaque sur les réseaux de voie ferrée, vendredi 26 juillet, qui a perturbé le déplacement de l’équipe des États-Unis à Paris. Il a donc fallu se réarticuler pour sécuriser un déplacement par voie routière.

Le PCO est organisé en cellules. L’une est chargée de générer en permanence de la ressource et d’éditer des fiches de poste synthétiques à la disposition de chaque chef de dispositif montant. La cellule renseignement m’informe de l’évolution de la menace. La cellule conduite des opérations est divisée en trois groupes de forces : un dédié aux sites d’hébergement, un autre aux sites d’entraînement, commandés par deux commandants de compagnie, et un dernier groupe dédié aux escortes, commandé par le commandant de l’EDSR. Enfin, la cellule suivi opérationnel, avec un détachement de six militaires du Centre zonal des opérations (CZO) de la Région de gendarmerie des Hauts-de-France qui, après l’appui qu’il nous a fourni au cours de la phase de planification de cette manœuvre, assure maintenant le suivi des opérations, minute par minute, et s'acquitte de la remontée des informations, en temps réel, vers le Centre national des opérations (CNO) de la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et le Centre opérationnel départemental (COD) activé à la préfecture.

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