Disparue des routes depuis plus de 30 ans, une Alpine A110 de la gendarmerie nationale datant de 1971 a refait surface, bien loin de ses missions d’antan. C’est dans l’atelier d’Aurélien Letheux, connu des amateurs du programme télévisé « Wheeler Dealers », que la berlinette historique a entamé une nouvelle vie. Une fois restaurée, d’ici début 2025, l’Alpine rejoindra les plus de 200 véhicules anciens de la collection du Musée de la gendarmerie nationale, à Melun.

Un véhicule rapide d’intervention d’époque

Cette Alpine A110 1600s menait des missions sur l’autoroute A1, reliant Paris à Lille, dans le secteur de Roye (Somme), de 1971 à 1979. Le bolide fait partie des quatorze véhicules de ce type qui ont existé en Gendarmerie.

Achetée en 1979 par un particulier, avec plus de 200 000 kilomètres au compteur, témoins de huit années de mission, elle va passer du bleu au blanc radar, perdant ainsi ses attributs de gendarmerie. Jusqu’au début des années 1990, son propriétaire va rouler avec, puis il va la laisser dans un garage pendant plus de 30 ans. 

C’est à la fin de l’année 2022 que Jean-Yves Hardouin, responsable de la mémoire mécanique du Musée de la gendarmerie nationale, et un ami gendarme vont réussir à retrouver le véhicule et certifier son authenticité. Elle sera ensuite rachetée par le Fonds de dotation pour le Musée de la Gendarmerie nationale (FDMGN).

« L’Alpine A110 1600s manquait à la collection de véhicules du Musée et grâce à nos recherches, nous avons réussi à en trouver une, relate Jean-Yves Hardouin. Je l’ai identifiée grâce au numéro de série et il s’est avéré que c’était un véhicule authentique. C’était vraiment un gros coup de chance, car on l’a trouvée à 30 kilomètres du Musée, à Melun, et c’était une personne qui souhaitait la vendre, chose rare quand on détient une voiture de collection. »

Pour réaliser l'opération, le Musée a pu compter sur le soutien du FDMGN. Ce fonds de dotation, administré par une équipe de réservistes citoyens bénévoles, a été lancé lors du salon Rétromobile 2022 à l'initiative de la Gendarmerie Nationale et de quelques fondateurs dont Jean Todt appuyé par des mécènes fondateurs tels que l'ACO (Automobile Club de l'Ouest,  créateur et organisateur des 24 Heures du Mans), ASO (Amaury Sport Organisation, organisateur du Tour de France et du rallye Dakar), et l’entreprise française Motul (acteur majeur du monde automobile).

Le FDMGN agit sur 4 axes principaux : la restauration et la valorisation du patrimoine, le rayonnement de la gendarmerie, l'éducation à travers des actions menées en lien avec des écoles et lycées, la participation aux progrès de la connaissance et de la recherche portant sur le patrimoine du musée de la gendarmerie nationale. Il a pour mission de collecter des fonds afin d'accompagner le Musée de la Gendarmerie nationale dans la conservation et l'élargissement de son patrimoine et notamment le patrimoine mécanique de la Gendarmerie.

Un temps de restauration conséquent

Durant plusieurs mois, un défi de taille attend l’équipe d’Aurélien Letheux, en charge de restaurer ce véhicule unique : restituer l’authenticité du modèle, tout en respectant les normes de sécurité actuelles. Châssis, moteur, mécanique, carrosserie, intérieur… chaque élément de l’Alpine A110 1600s a fait l’objet d’une attention minutieuse.

« La restauration de cette Alpine a débuté par le démontage complet de la voiture. On sort le châssis de la coque en fibre, puis on décape toute la voiture, c’est-à-dire que l’on enlève toutes les couches de peinture pour revenir à la fibre, à la résine, et ainsi éviter de remettre de la peinture sur de la peinture », explique Kévin Mouquet, carrossier-peintre chez Méca Rétro Sport 76 depuis 2014.

Loin d’être une mince affaire, la restauration de cette berlinette nécessitera environ 800 heures de travail au total. Malgré l’ampleur de la tâche, environ 50 % du travail a déjà été réalisé par l’équipe de restaurateurs, se relayant quotidiennement pour consacrer au moins une personne au projet chaque jour.

« Aujourd’hui, on pose tous les ouvrants et on protège la fibre de la carrosserie, qui est à nue, avec une épaisse couche de mastic. L’objectif est d’obtenir une jolie carrosserie sans aucun défaut, de revenir à ses formes d’origine, explique le carrossier-peintre. Ensuite, il y aura l’étape du ponçage, une grosse partie qui va demander au moins 70 heures. Puis on isolera le mastic avec de l’après-finition, on reponcera cet après-finition et on finira par la peinture bleu opaque, en brillant directement, conforme à l’origine. »

Les restaurateurs s’occupent également du remontage complet de la voiture et de la partie motorisation. « On refait le moteur au complet : on l’ouvre et on fait une révision complète. Il sera comme neuf une fois le travail effectué. L’Alpine sera donc opérationnelle pour rouler comme si elle sortait d’usine », indique Kévin Mouquet. La finition Gendarmerie sera dévolue à la mémoire mécanique du musée, avec le matériel et la sérigraphie d’époque.

Arrivée au garage peu avant le Salon Rétromobile, en février 2024, l’Alpine A110 a pour objectif d’être présentée lors de la prochaine édition du Salon, qui se déroulera du 5 au 9 février 2025. Elle rejoindra ensuite le Musée de la Gendarmerie nationale pour profiter d’une retraite bien méritée, aux côtés d’autres modèles anciens - voitures, motos, blindés, camions, bus, hélicoptère, bateau, motoneiges -, tous déclassés en leur temps par l’arrivée de modèles plus récents, et déclarés de collection pour le musée dans la foulée.

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