JOP de Paris 2024 : une manœuvre opérationnelle et logistique d’une ampleur et d’une durée inédites en Île-de-France

  • Par Antoine Faure
  • Publié le 22 juillet 2024
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Commandant de la Région de gendarmerie Île-de-France, commandant de la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité de Paris, après avoir commandé entre autres les Groupements de gendarmerie départementale (GGD) des Pyrénées-Atlantiques, de la Gironde, ainsi que la Gendarmerie de La Réunion (974), le général de corps d’armée Xavier Ducept a été désigné Commandant des forces de gendarmerie (COMFORGEND) pour les Jeux Olympiques de Paris. Il présente les grandes lignes de cette manœuvre opérationnelle et logistique d’une ampleur et d’une durée inédites.

Mon général, comment s’anticipe et se prépare une manœuvre de sécurisation de l’ampleur de celle attendue pour les Jeux Olympiques de Paris (JOP) ?

Avant d’être envisagée en termes de sécurisation, cette manœuvre l’a été en termes logistiques. C’était en effet un défi logistique majeur que d’être en mesure d’accueillir en Île-de-France, dans les meilleures conditions et sur une longue durée, un nombre de gendarmes, alors indéterminé mais que j’imaginais conséquent. Le travail réalisé depuis plus de deux ans a donc été d’abord de déterminer comment nous allions pouvoir accueillir ces forces. En premier lieu en valorisant le patrimoine de la gendarmerie, par l’augmentation de nos capacités d’hébergement, de 1400 à 1600 lits, mais également notre patrimoine au sens large, à savoir nos écoles, nos centres de formation. Puis en allant chercher, au-delà de l’offre hôtelière, onéreuse et limitée, d’autres capacités, d’où les conventions passées avec de grands lycées de la région parisienne, comme Stanislas ou Sainte-Geneviève. D’où l’idée aussi de se rapprocher de l’économat des Armées, qui a une compétence en matière de projection de forces, pour structurer avec eux l’offre modulaire qui nous permet d’accueillir près de 3 500 gendarmes, dans des chambres doubles, climatisées, avec le maximum de confort attendu pour durer.

Tout aussi important que l’hébergement, l’alimentation. C’est loin d’être évident de nourrir plus de 12 000 personnes, matin, midi et soir, pendant une longue durée, à la fois sur les sites d’hébergement et d’engagement. Là aussi, nous avons choisi de valoriser notre patrimoine, en faisant des travaux partout où nous avions des cercles mixtes, afin qu’ils puissent accueillir plus de monde. Pour les sites où nous n’avions pas cette possibilité, les gendarmes disposeront de cartes d’alimentation permettant de se restaurer dans des établissements du secteur privé. Par ailleurs, 150 000 lunch box ont été préparées, notamment pour les personnels employés sur les itinéraires de courses cyclistes ou dans des endroits isolés, ainsi que 365 000 en-cas box, pour s’alimenter aussi en dehors des repas, car les journées seront longues. Enfin, plus d’un million de bouteilles d’eau ont d’ores et déjà été stockées et seront positionnées sur les différents sites d’engagement, dans des structures d’accueil offrant la possibilité de déjeuner, de se reposer, de recharger les batteries du téléphone…

Pour assurer ce soutien, nous avons mis en place une Base logistique avancée (BLA) à Paris, ainsi que cinq points d’appui logistique (à Maisons-Alfort, Dugny, Beynes, Melun et Satory, NDLR) et des plots logistiques au cœur de la capitale, pour répondre aux besoins et aux problématiques au plus près du terrain. Les capacités de soutien, pour l’alimentation, l’automobile, le matériel, l’armement de la Région Île-de-France sont renforcées par 800 personnels venus de toute la France métropolitaine.

Tout est donc en place pour que les forces engagées soient accompagnées dans tous les domaines, tout au long de la manœuvre.

Quelles seront les missions de ces gendarmes ?

Nous sommes placés pour emploi auprès de la Préfecture de police (P.P.), qui est notre donneur d’ordre. C’est une structure très organisée, très hiérarchisée, au sein de laquelle l’image de marque de la gendarmerie est remarquable. Il existe une vraie relation de confiance.

L’élaboration du volet missionnel a donc été le fruit d’un travail très itératif avec la P.P., qui en a déterminé les grands axes. Nous avons travaillé avec eux pour voir comment nous allions nous insérer dans ces missions en y apportant les savoir-faire de la gendarmerie.

Ces grandes missions sont : la protection des sites olympiques, avec la mise en place de périmètres d’interdiction autour de ces grands sites ; la sécurisation des transports collectifs ; la sécurisation des abords touristiques ; les escortes ; et les missions dites « de pic », à savoir les cérémonies d’ouverture et de clôture, les épreuves sur route et le marathon. Elles peuvent évoluer en fonction des événements, et nous devrons savoir faire preuve de souplesse et d’adaptabilité.

À titre d’exemple, pour les transports collectifs, nous avons dit très tôt, lors des échanges avec la P.P., la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et la Direction générale de la police nationale (DGPN), que nous étions en capacité de prendre en compte cette mission avec la P.P., parce que nous en avons l’habitude en Île-de-France. Nous allons ainsi déployer pendant les JOP 550 patrouilles de gendarmerie dans les transports publics, chaque jour, en renfort des 150 patrouilles de la P.P. Nous assurerons ainsi 70 % de cette mission.

Depuis plus d’un an, nous avons intégré le Centre de coordination opérationnelle de la sécurité (CCOS), et nous avons pris part progressivement à cette mission. Dans un premier temps, entre 7 et 10 forces ont été engagées quotidiennement, pour une cinquantaine de patrouilles dans le métro, le RER et les grandes gares. Ils ont suivi une formation spécifique pour pouvoir intervenir dans ces zones, et sont équipés avec des systèmes de radio spécifiques. Leur mission est complètement intégrée à la manœuvre de la P.P., avec un Groupement opérationnel de maintien de l'ordre (GOMO) Transports, des Groupements tactiques de gendarmerie (GTG) Transports et des escadrons de gendarmerie mobile. Nous monterons jusqu’à 30 forces pendant les Jeux, à la fois de gendarmerie mobile, mais aussi et surtout de gendarmerie départementale, à savoir des compagnies de marche de la Région Île-de-France, qui ont l’habitude de cette mission, et des compagnies de marche qui vont venir du reste de la métropole.

La particularité de l’organisation de la gendarmerie lors de ces Jeux Olympiques est d’avoir mis en place, en plus des GTG de Gendarmerie mobile (G.M.), des GTG de Gendarmerie départementale (G.D.). Pourquoi ce choix ?

Pour deux raisons. D’abord parce que les missions confiées à la gendarmerie pour ces J.O. dépassent largement le cadre habituel de l’engagement de la gendarmerie mobile. Elles relèvent de la sécurité publique générale, c’est-à-dire les missions traditionnelles de la gendarmerie départementale. Ensuite, parce qu’au plus fort de la manœuvre, 18 000 gendarmes seront employés, dont la moitié seront des G.D. intégrés dans des compagnies de marche. Cela impliquait un nombre très conséquent de GTG. Or, la volumétrie des GTG mobiles n’était pas suffisante. Il a donc fallu travailler différemment.

L’ensemble des capacités de la G.M. sera mis en œuvre. C’est une force extrêmement polyvalente, qui peut réaliser du travail de brigade départementale jusqu’à du rétablissement de l’ordre.

Concernant la G.D., elle sera maintenue dans ses missions traditionnelles. Ainsi, les motocyclistes feront essentiellement de l’escorte, et un peu de circulation, tandis que les G.D., au sein des compagnies de marche, auront des missions de sécurisation de site et de sécurité publique générale, avec cette particularité qu’ils seront en unité constituée et non plus en brigade. Les G.M. sont habitués à ces déplacements de longue durée, mais les G.D., surtout ceux qui n’ont pas d’expérience en mobile, vont découvrir ce travail en unité constituée et auront besoin d’être accompagnés par les GTG.

Quelles sont les principales menaces qui pèsent sur cet événement ?

La menace est protéiforme et nécessitera la mobilisation de tous. Elle est liée à la fois au contexte politique et au contexte international, avec une menace terroriste qui demeure prégnante. Elle est également sociétale, car les Jeux Olympiques sont une caisse de résonance pour toutes les revendications sociales, et que la menace activiste, déjà très présente, va encore augmenter. Il faudra être en mesure d’intervenir rapidement pour la contrecarrer, la juguler. Il y aura aussi bien sûr une menace délinquante, l’afflux de personnes entraînant corrélativement le déploiement de réseaux de proxénétisme, de vols, de trafics de stupéfiants, de cigarettes, de produits de contrefaçon, etc.

Il existe également une forte menace cyber, et chaque gendarme aura son rôle à jouer pour sécuriser nos réseaux en adoptant les bonnes pratiques d’hygiène informatique.

Enfin, il y a la menace drones. Ce n’est pas le gendarme sur le terrain qui neutralisera le drone, mais il peut être celui qui va le repérer. Un important dispositif de Lutte anti-drone (LAD) sera bien sûr mis en œuvre, mais chacun pourra y contribuer par la détection et le compte rendu rapide.

Quels sont les enjeux olympiques pour la gendarmerie nationale ?

C’est une immense aventure, parce qu’en termes de volume de forces engagées, c’est totalement inédit. La durée de la mission est également inégalée. Ce sont des J.O. uniques, qui se déroulent pour une grande partie en ville, en dehors de sites sportifs, et qui vont donc impacter la voie publique et les grandes infrastructures. Cela générera des tensions avec la population parisienne, d’ores et déjà contrainte par des restrictions de circulation, des fermetures de ponts, d’axes, de stations de métro… Il faudra gérer ces tensions, et ce sera aussi le rôle des gendarmes.

La réussite de ce défi passe par une mobilisation générale : officiers et sous-officiers d’active et de réserve, gendarmes adjoints volontaires, élèves gendarmes, personnels civils… Cette grande diversité impliquera la nécessité d’avoir un encadrement très présent. Les chaînes de commandement, de concertation, de déontologie auront un rôle important à jouer.

L’objectif, c’est de faire que ces Jeux se déroulent dans les meilleures conditions, avec un public qui se sent sécurisé, dans une ambiance qui reste celle d’une grande fête du sport, et qu’ainsi Paris et la France rayonnent.

L’enjeu pour la gendarmerie, c’est de démontrer une fois de plus sa capacité opérationnelle, son efficacité, sa résilience, et d’être toujours en capacité de répondre aux attentes de la P.P., en tout temps et en tout lieu, dans le cadre strict de l’enveloppe décidée par le Directeur général de la gendarmerie nationale.

Le 31 décembre 2023, plus d’un million de personnes étaient réunies sur les Champs-Élysées, en toute sécurité, avec un engagement remarquable de la gendarmerie, mais aussi une bienveillance unanimement saluée. C’est l’image que l’on doit donner lors de ces Jeux. Le défi est grand, mais je suis très confiant parce que je connais nos capacités et notre résilience.

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