Guyane : à Maripasoula, le maréchal des logis Daniel pirogue pour la gendarmerie
- Par le capitaine Tristan Maysounave
- Publié le 29 juin 2024
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En Guyane française, le pilotage des pirogues nécessite une certaine technicité, en raison des dangers que représentent les fleuves. En conséquence, plusieurs brigades de gendarmerie disposent de piroguiers attitrés. À Maripasoula, le maréchal des logis Daniel est l’un d’entre eux.
Daniel est né en 1977, à Maripasoula, au cœur de l’Amazonie. La commune est bordée par le fleuve Maroni, qui délimite la frontière avec le Suriname. Particulièrement isolée, cette localité n’est accessible que par les airs ou par voie fluviale. En raison des hauts-fonds et du courant important, la pirogue est le moyen de locomotion privilégié pour circuler sur le fleuve et accéder aux villages voisins. Deux jours de navigation sont ainsi nécessaires pour atteindre le littoral. Sur la rive opposée du Suriname, se sont développés des comptoirs spécialisés dans la vente de matériels dédiés à l’orpaillage illégal. Ces derniers sont ensuite acheminés par le fleuve afin d’alimenter les chantiers clandestins de la Guyane française.
L’activité des deux communes s’est donc logiquement construite autour du Maroni et de la figure incontournable des piroguiers. À l’image des habitants, les gendarmes de la Communauté de brigades (CoB) de Maripasoula s’appuient sur leurs compétences, aussi bien pour effectuer des missions sur le fleuve (lutte contre l’orpaillage illégal, contact avec les peuples autochtones, etc.) que pour réaliser des opérations logistiques (ravitaillement de l’unité en carburant, déménagement d’un gendarme, etc.). Le maréchal des logis Daniel est l’un des quatre piroguiers affectés dans cette unité.
Piroguier de père en fils
Dans la famille de Daniel, on est piroguier de père en fils. C’est donc naturellement qu’il a appris dès le plus jeune âge à piloter ces embarcations. « Avant de devenir militaire, je travaillais avec mon père qui exerçait une activité de transport en pirogue, explique-t-il. À Maripasoula, il n’est pas possible de se déplacer en voiture, les gens ont recours à cette embarcation. J’ai donc appris à piloter mais aussi à effectuer des réparations, par exemple en cas de panne du moteur. »
Majeur, Daniel sert d’abord dans les troupes de Marine pendant trois ans. À l’issue de son engagement, il choisit de revenir à Maripasoula et apprend que la gendarmerie cherche à recruter un piroguier. Daniel répond alors à l’appel à candidature et peu de temps après se voit proposer un contrat dans cette spécialité. Huit années se sont écoulées depuis lors.
Une technicité indispensable
Piloter une pirogue nécessite adresse et concentration. La coloration marron et l’opacité de l’eau sont trompeuses et cachent en effet de nombreux hauts-fonds, des rochers et des troncs à la dérive. « Mon père m’a appris à lire le fleuve, explique Daniel. En regardant l’eau, on a l’impression qu’il est possible d’aller tout droit, mais ce n’est pas le cas. Il faut zigzaguer pour éviter les obstacles. Je les distingue en analysant les mouvements de l’eau et je connais à peu près le fleuve par cœur. La navigation est plus ou moins difficile en fonction des périodes de l’année. Le niveau de l’eau diminue au cours de la saison sèche. En juin et juillet, il devient par exemple très compliqué de naviguer. Pour moi, le plus dur est de franchir les sauts les plus importants. Il s’agit de petites chutes d’eau bordées de rochers. Parfois, nous ne parvenons tout simplement pas à les passer. Nous sommes alors obligés d’alléger la pirogue de son contenu et de la transporter à pied jusqu’au point suivant. »
Le fleuve étant central dans les missions de la gendarmerie, les piroguiers de la brigade de Maripasoula sont employés quotidiennement.
Employé quotidiennement
« Je suis sur le fleuve tous les jours, précise Daniel. Les missions sont diverses mais elles m’intéressent toutes. Je suis très souvent employé dans le cadre de la lutte contre l’orpaillage illégal. Nous essayons d’arrêter les garimpeiros (chercheurs d’or clandestins, NDLR) qui transportent du matériel sur le fleuve. Cet engagement est important afin de préserver la nature. »
En raison de ces actions, les piroguiers employés par la gendarmerie sont menacés par les orpailleurs illégaux. Comme tout gendarme, ils disposent donc d’une arme à feu et bénéficient d’une attention particulière de leurs camarades, qui ont déjà pu éprouver la détermination des garimpeiros par le passé. En effet, la brigade a par exemple déjà fait l’objet de cambriolages visant à récupérer les pirogues et moteurs saisis dans le cadre de la lutte contre l’orpaillage illégal.
« Je participe également aux services de contact dans les villages. Sur place, j’obtiens facilement des renseignements, car je comprends le Français mais aussi le Créole, le Portugais et le Sran Tongo, principalement parlé au Suriname et à l’ouest de la Guyane. Je peux donc faire le lien entre les gendarmes et les habitants. Parfois, je renforce également d’autres unités. Je peux par exemple transporter les gendarmes de la Section de recherches de Cayenne jusqu’à une zone inaccessible autrement que par le fleuve dans le cadre d’une recherche de cadavre. »
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Daniel est fier de son métier, qui lui permet de faire vivre une famille de huit enfants, alors que les habitants de Maripasoula ont généralement des difficultés à trouver du travail. Une situation qui contraint d’ailleurs une partie d’entre eux à quitter la commune afin de rejoindre Cayenne.
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