La gendarmerie de l’Armement entame sa transformation avec la création d’une formation dédiée aux escortes

  • Par le capitaine Tristan Maysounave
  • Publié le 14 juin 2024
Gendarme de l'armement effectuant une sécurisation.
© GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN

Depuis 50 ans, la gendarmerie de l’Armement (GARM) est chargée de la sécurisation des sites de la Direction générale de l’Armement (DGA) et de la protection des convois liés à leur activité. Cette gendarmerie spécialisée s’est récemment engagée dans un processus de transformation. Parmi les premières concrétisations de cette évolution, figure la mise en place d’une formation dédiée aux escortes.

Clé USB cryptée, matière dangereuse, satellite militaire sont autant d’éléments stratégiques que les personnels des treize Brigades de gendarmerie de l’Armement (BGARM) ont la responsabilité de convoyer entre les différents sites de la Direction générale de l’Armement (DGA) et les Points d’importance vitale (PIV), que ceux-ci soient situés sur le territoire métropolitain ou ultramarin. Alors que la mission d’escorte ne faisait pas l’objet d’une formation spécifique, un stage d’une semaine dénommé « formation initiale aux escortes GARM » a récemment été créé sous l’impulsion du général Christophe Urien, commandant la GARM. Organisées sur le site « DGA essais de missiles site Landes » de Biscarrosse (département des Landes), les premières sessions ont débuté au début de l’année. L’objectif est de former les 318 militaires de cette gendarmerie spécialisée.

Situés entre Biscarrosse plage et Mimizan plage, les 15 000 hectares du site de la DGA constituent un terrain d’entraînement propice à la formation des gendarmes de l’Armement. Strié par des kilomètres de route encadrés de pins landais, le site permet de confronter les stagiaires à des conditions proches de la réalité. Outre le site de la DGA, les exercices se déroulent également sur un stand de tir civil situé à proximité. Alors que la gendarmerie de l’Armement a récemment fêté ses 50 ans d’existence, cette formation qualifiante permet de recentrer les personnels sur leurs missions prioritaires et d’approfondir leur professionnalisation.

Recentrer la gendarmerie de l’Armement sur son cœur de métier

« Depuis 1973, les gendarmes de l’Armement protègent le patrimoine humain, technique, matériel et immatériel de la DGA, autorité d’emploi historique et principale de la GARM, explique le général Urien. Le contexte géostratégique dégradé (guerre en Ukraine, tensions au Proche-Orient), la prégnance de la menace terroriste et les contestations erratiques des mouvements « ultra » m’ont conduit à engager une réflexion sur le renforcement des capacités de la gendarmerie de l’armement pour assurer ses missions. Même si la GARM, à travers ses brigades, réalise certaines missions similaires à la gendarmerie départementale sur des circonscriptions particulières (renseignement, contact, prévention, intervention, police judiciaire), le cœur missionnel reste la protection-sûreté, avec un volet mobilité non négligeable : protection de sites sensibles, protection de personnes, protection du secret de la Défense nationale, protection de matériels classifiés transportés. »

Après 50 ans d’existence, et au regard des menaces précitées, il apparaissait nécessaire de faire évoluer le modèle. Ainsi, un projet, dénommé Gendarmerie de l’Armement – Nouvelle génération (GARM-NG), a vu le jour fin 2023. « Il poursuit cinq objectifs, poursuit le général Urien. Le premier d’entre eux vise à accroître les compétences dans les domaines des escortes et de l’intervention professionnelle (IP). Il s'agit de développer la formation des militaires en matière d’IP et d’escortes, avec une pédagogie adaptée. Le stage de formation aux escortes, suivi par tous les militaires de la GARM, a été créé ex-nihilo afin d’être en cohérence avec les spécificités de nos transports, dont certains intéressent la dissuasion nucléaire. Le deuxième consiste à durcir nos capacités, notamment en rehaussant le niveau de nos équipements individuels et collectifs. Je souhaite également développer la culture de gestion de crises, sur la base d'exercices et de scenarii réguliers, couvrant l'ensemble des évènements auxquels nous pouvons être confrontés (intrusion, manifestation, découverte de colis suspects, déclenchement d'alarme, etc). Le quatrième objectif est de diversifier notre recrutement en ouvrant l'accès à la GARM aux gendarmes mobiles et aux gardes républicains dès cette année. Le dernière mesure consistera à changer l’appellation des BGARM afin de faciliter l’identification de nos missions centrées sur la protection et de renforcer notre attractivité. Elles devraient prendre l'appellation de "Peloton de sûreté et de protection de la GARM" (PSP-GARM). Une réflexion sur l'adoption d'une nouvelle tenue est également en cours. »

Véhicules de la GARM escortant un véhicule civil.
© GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN

Le capitaine Tony, commandant le groupe de protection de la gendarmerie de l'Armement et responsable de la « formation initiale aux escortes GARM » complète : « L’ancienne doctrine précisait que les unités de la GARM étaient des brigades de la gendarmerie de l’Armement, sur le modèle de celles existant en gendarmerie départementale. Mais la gendarmerie de l’Armement a d’abord été créée afin d’assurer la protection des sites confiés et la gestion des escortes. »

Dans le domaine sensible des escortes, la gendarmerie de l’Armement s’est donc engagée dans un processus de professionnalisation de ses militaires. Celle-ci exige d’homogénéiser et d’approfondir leurs compétences.

Homogénéiser et approfondir les compétences

Depuis le début d’année, plusieurs sessions de formation aux escortes sont organisées afin de parvenir à former l’ensemble des militaires de la gendarmerie de l’Armement malgré les contraintes opérationnelles des unités. Les stagiaires, provenant de toute la France, abordent successivement des enseignements théoriques et techniques avant de se confronter à plusieurs séances de tir et à des cas concrets imaginés par les formateurs. Le contenu de la formation a été élaboré en lien avec les différentes unités de la GARM qui sont chargées d’escortes différentes en raison des spécificités propres aux sites de la DGA qu’elles sécurisent.

Les instructions théoriques du stage permettent de partager du renseignement sur les différents matériels convoyés qui différent d’une unité à une autre. Les instructions rappellent également le cadre de mise en œuvre des escortes et incitent les stagiaires à réfléchir à leur conception de manœuvre. Ceux-ci sont confrontés à une posture décisionnelle, les conduisant à devoir décliner des cadres d’ordre clairs et précis, indispensables à la compréhension de l’opération par leurs camarades et leur autorité d’emploi.

Militaires effecutant un exercice théorique.
© GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN

« Au cours de la formation, nous étudions tous les dispositifs d’escorte que les militaires de la GARM peuvent être amenés à conduire, explique le capitaine Tony. Les missions peuvent être effectuées en uniforme ou en tenue civile, en véhicule sérigraphié ou banalisé mais aussi par voie ferroviaire. Les dispositifs sont susceptibles d’inclure plusieurs véhicules mais aussi des motocyclistes. Des renforts peuvent être sollicités, qu’il s’agisse d’autres gendarmeries spécialisées (gendarmerie maritime, gendarmerie de l’air, gendarmerie de la sûreté des armements nucléaires ou encore gendarmerie des transports aériens), d’unités de la gendarmerie départementale ou mobile. Dans le cadre de la mission Syracuse, nous sommes par exemple pris en compte par des gendarmes mobiles à notre arrivée en Guyane. »

Gendarme de la GARM procédant à la vérification d'un véhicule à l'aide d'un miroir.
© GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN

La formation systématise le processus de prise en compte du convoi à escorter (contrôles liés au conducteur et au matériel transporté, vérification de l’absence de balise, opérations de déminage, etc.) et aborde les incidents auxquels les gendarmes peuvent être confrontés au cours de leurs escortes, que ceux-ci se situent dans le bas du spectre opérationnel (crevaison ou panne d’un véhicule de l’escorte, gendarme malade, etc.) ou dans le haut du spectre (accident corporel, prise à partie du convoi, etc.). L’objectif étant finalement de créer des automatismes communs visant à garantir l’intégrité du matériel escorté, quelle que soit la situation.

L’adjudant Didier, affecté à la BGARM de Toulouse, souligne les bénéfices de la formation. « Celle-ci nous permet d’acquérir des automatismes qui nous aident à mieux réagir aux situations rencontrées. Nous faisons preuve d’un maximum d’engagement au cours des différents exercices afin de se rapprocher au plus près de la réalité. »

Les instructeurs ont également souhaité concevoir une session de tir la plus opérationnelle possible. Au cours du stage, les participants valident ainsi le certificat d’utilisation des grenades à main, potentiellement utilisées en cas de prise à partie du convoi par exemple, ainsi que le module du port de l’arme en tenue civile. Afin d’approfondir la prise en compte des contraintes liées à l’environnement et d’éviter les dommages collatéraux, les sessions incluent des exercices simulant une rame de train, se rapprochant du programme Train Marshall ou encore une extraction de l’équipage à partir d’un véhicule pris sous le feu.

  • Gendarme de la GARM tirant derrière une protection.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Plusieurs militaires de la GARM tirant derrière des protections.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes effectuant un tir selon la technique du Train Marshall
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes s'entrainant à s'extraire d'un véhicule pris sous le feu.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarme en civil effectuant un tir derrière une voiture.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes s'entrainant à s'extraire d'un véhicule pris sous le feu.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes s'entrainant au tir en civil.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarme lançant une grenade pour s'extraire d'une situation.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarme se protégeant derrière un véhicule.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarme de la GARM tirant derrière une protection.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Plusieurs militaires de la GARM tirant derrière des protections.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes effectuant un tir selon la technique du Train Marshall
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes s'entrainant à s'extraire d'un véhicule pris sous le feu.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarme en civil effectuant un tir derrière une voiture.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes s'entrainant à s'extraire d'un véhicule pris sous le feu.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarmes s'entrainant au tir en civil.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarme lançant une grenade pour s'extraire d'une situation.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN
  • Gendarme se protégeant derrière un véhicule.
    © GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN

« Les gendarmes se sentent mieux préparés après ce stage, précise l’adjudant Vincent, affecté à la BGARM de Bourges (département du Cher) et détaché comme instructeur dans le cadre de la formation. Ils apprennent, par exemple, à mettre en œuvre les nouveaux matériels. Les séances de tir leurs permettent d’appréhender la cross coudée installée sur le pistolet mitrailleur HK UMP9 et d’utiliser des fumigènes. Cette formation participe à la montée en puissance des escortes. »

Le stage donne enfin lieu à des applications concrètes incluant l’ensemble des enseignements abordés. Plusieurs gendarmes, de préférence gradés d’encadrement, doivent effectuer un déroulé complet à partir d’une situation donnée. Ils élaborent la manœuvre, répartissent les missions à leurs camarades, puis conduisent les opérations sur le terrain en s’adaptant aux incidents successifs. L’adjudant Irwin, de la BGARM Le-Bouchet (Essonne), est l’un d’entre-eux : « Il y a eu plusieurs phases théoriques incluant de la schématisation auxquelles ont succédé des mises en situation. Celles-ci nous mettent un peu sous pression, mais nous conduisent également à nous rendre compte que nous sommes capables d’appliquer les schémas abordés au cours du stage. Cette formation s’inscrit dans le cadre de la professionnalisation de la GARM. »

« La formation favorise l’homogénéisation des savoir-faire de la GARM », complète l’adjudant Sébastien, affecté à la BGARM de Biscarrosse, à l’issue de celle-là. Le capitaine Tony conclut : « Nous allons poursuivre cette dynamique, Nous avons ainsi créé une mallette pédagogique reprenant les contenus de cette formation, sur laquelle les gendarmes pourront s’appuyer de retour dans leurs unités. Des recyclages seront périodiquement effectués afin de maintenir la maîtrise de ces savoir-faire. La diffusion et le développement de cette technicité devraient faciliter les mutations au sein de la gendarmerie de l’Armement et l’attractivité de cette gendarmerie spécialisée. »

Le capitaine Tony de la GARM.
© GEND/ SIRPAG/ BRC.TAUPIN

Portrait du capitaine Tony

Je suis rentré en gendarmerie en tant que gendarme auxiliaire en 1998. L’année suivante, j’ai intégré l’école de gendarmerie de Montluçon afin d’y suivre la formation de sous-officier. À l’issue de celle-ci, j’ai été affecté à l’Escadron de gendarmerie mobile (EGM) 23/7 de Sélestat, en Alsace. J’y ai servi pendant 5 ans après avoir rejoint le peloton d’intervention. J’ai ensuite effectué un changement de subdivision d’arme (CSA) afin de rejoindre la gendarmerie départementale. En 2009, après avoir passé trois années en brigade, j’ai répondu à un appel à volontaires dans le cadre de la création des Pelotons spécialisés de protection de la Gendarmerie (PSPG) chargées de la protection des centrales nucléaires. Cette affectation m’a permis de développer mes compétences et de m’ouvrir l’esprit sur les nombreuses possibilités offertes par la gendarmerie en obtenant le Monitorat en intervention professionnelle (MIP), la qualification d’Explosive ordnance reconnaissance (EOR) - ex reco Nedex et en effectuant des formations dans le domaine de l’Intervention spécialisée (IS), de l’effraction ou encore du renseignement. Ce poste m’a progressivement conduit à être positionné en tant que chef opérationnel.

Cette prise de responsabilité m’a incité à présenter le concours d’Officier de gendarmerie rang (OGR) en 2017. À l’issue de la formation à l’École des officiers de la gendarmerie nationale (EOGN), j’ai été affecté à la tête du Peloton de surveillance et d'intervention gendarmerie (PSIG) d'Amboise, en Indre-et-Loire. Après trois ans, j’ai été muté à Arcueil (Val-de-Marne) afin de prendre le commandement du groupe de protection de la gendarmerie de l'Armement, chargé de la protection rapprochée des hautes autorités de la DGA et des délégations étrangères qui viennent en France dans le cadre des contrats d’armement.

 

Pour en savoir plus, découvrez le magazine dédié aux 50 ans de la Gendarmerie de l'Armement.

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